Problématique de l'utilisation des services de soins de santé conventionnels en milieu nomade au Mali : cas de la commune rurale de Tilemsi, Cercle de Gao, Région de Gao
Abstract
La présente étude de recherche en santé publique portant sur la problématique de l'utilisation des services des soins de santé conventionnels par les populations nomades de la commune rurale de Tilemsi (cercle de Gao et région de Gao, Mali) s'est déroulée sur 4 mois (d'Août à Novembre 2009) au niveau de l'unique centre de santé (CSCom) de Tin-Aouker dont dispose ces pasteurs nomades, de six (06) localités semi nomades et de onze(11) campements nomades. Pendant nos travaux, il a été constaté qu'au sein de ces pasteurs nomades malgré la faiblesse de leur utilisation du centre de santé, ils ont unanimement exprimés leur confiance et leur reconnaissance vis-à-vis de la nécessité incontournable de la médecine moderne. Cependant, à l'instar des régions nord du Mali, les pasteurs nomades de la commune rurale de Tilemsi se trouvaient jadis, particulièrement affectés par des aléas climatiques (sécheresses, péril acridien, manque d'eau) associés à des rebellions armées récurrentes. Ce sont des facteurs à la fois précurseurs et aggravant leur historique marginalisation socio-économique se traduisant par une vulnérabilité croissante vis-à-vis de leur accessibilité naturellement précaire aux services fondamentaux de base en terme de santé, de l'éducation et de l'eau potable. A ceci s'ajoute, l'intérêt non moins important que ces populations nomades rencontrées accordent à la santé de leur cheptel et leur contact étroit avec ce dernier. C'est un constat qui invite profondément à une réflexion sur les voies et moyens appropriés pour leur utilisation des services des soins de santé nécessitant à notre humble avis, des approches multidisciplinaires associant action et recherche sur la santé humaine et animale simultanément. Les pasteurs nomades de la République du Mali sont jadis confrontés aux problèmes de la scolarisation pour des raisons à la fois socio-économiques, religieuses et culturelles. Depuis la période coloniale à 1980, les pasteurs nomades refusent de céder leurs enfants à la scolarisation et ne les livrent qu'en cas de force majeur sous une forte pression des autorités coloniales et Maliennes La fréquentation du centre de santé existant au niveau de la commune rurale de Tilemsi laisse à désirer suite aux spécificités socio culturelles et du mode de vie de ses populations nomades aussi mobiles que dispersées les mettant dans une position hors de portée de l'accès aux soins et à l'éducation disponibles. Malgré les efforts consentis par le gouvernement, les autorités sanitaires et leurs partenaires au développement depuis l'indépendance de la République du Mali à nos jours, les populations nomades de la commune rurale de Tilemsi et d'ailleurs ont du mal à s'approprier des approches pertinentes et efficaces en matière d'une couverture sanitaire digne de ce nom comparativement à certaines communautés rurales et sédentaires du Mali. Cet état de fait peut être imputable soit à l'insuffisance de ressources humaines, techniques et financières au niveau du département chargé de la santé publique, soit à une sous estimation de l'ampleur du problème de la santé publique que représente les contours du mode de vie nomade en République du Mali. Au regard de l'impact remarqué de tous les facteurs précédemment cités parmi tant d'autres, ces pasteurs nomades sont confrontés quotidiennement à un mode de vie superposable à un problème de santé publique, où les femmes, les enfants et les personnes âgées sont visiblement les plus vulnérables et occupent la première place en terme de morbi-mortalité. L'inaccessibilité aux services des soins de santé proposés se justifie quelque part par le fait que les aires de séjour propices aux déplacements de ces pasteurs nomades sont dépourvues de couverture sanitaire. Ainsi ils arrivent difficilement à fréquenter le centre de santé fixe existant pendant plusieurs mois des deux principales périodes d'activités (sèche et pluvieuse) des transhumances. Par ailleurs, les résultats de nos études ont démontré que le recours à l'auto médication (achat des médicaments ambulants) et à la médecine traditionnelle sont à la fois des précurseurs de la morbi mortalité et barrières non négligeables face à l'utilisation des services des soins de santé proposés aux pasteurs nomades rencontrés. Au terme de nos travaux, il a été constaté que la problématique de l'utilisation des services des soins de santé conventionnels par ces pasteurs nomades est superposable à un phénomène dynamique. Il ne relève guère, ni du choix et encore moins de leur bon état de santé, mais plutôt des contraintes naturelles, socio économiques et culturelles multifactorielles associées à une incohérence des approches, d'actions et des suivis des planificateurs sanitaires